Los sucesos de Níjar1
Les agressions racistes contre les immigrés sur le territoire de la commune de Níjar relancent le débat déjà inéluctable sur les divergences croissantes qui existent en Espagne entre l'éthique citoyenne et le progrès économique et, sur un plan plus général, entre l'augmentation du niveau de la vie dans les pays de l'Union Européenne et la misère de la majorité de l'humanité, condamnée à subsister dans des conditions précaires ou à émigrer, en prenant souvent des risques mortels, afin de s'assurer une vie digne. (…) Dans notre société de nouveaux riches, de nouveaux hommes libres, de nouveaux Européens, le changement de statut économique d'une grande partie de la population ne s'est pas produit simultanément avec le développement d'une éducation démocratique et d'une culture morale.
Quién te ha visto y quién te ve!2
Bien que la province d'Almeria ait été traditionnellement un pays d'émigrants, elle n'a jamais acquis une culture de l'émigration. (…) La mémoire d'un passé marqué par l'aspiration de fuir la pauvreté n'a pas façonné une compréhension pour la misère des autres, ni une éthique solidaire. L'arrivée pendant les quinze dernières années de Maghrébins et Subsahariens sans papiers pour remplir les emplois qu'aucun Espagnol n'accepte de prendre, dans des conditions indignes de notre personnalité européenne flamboyante, n'éveille pas de souvenir de compassion du passé ni une sympathie active envers les victimes de cette situation. Au contraire, les Maures et les Noirs réduits en esclavage dans les serres – nécessaires à l'intérieur, mais indésirables dehors – ravivent les sentiments égoïstes de supériorité et permettent aux ex-émigrés et fils d'émigrés de savourer la mise en scène actuelle du drame de leurs propres vies, représentés par d'autres acteurs, comme une vengeance exemplaire.
«Les événements de Nijar» J. Goytisolo in El Pais, 8 octobre 1999 (extraits)
«Qui t'a vu et qui te voit» J. Goytisolo in El Pais, 19 février 98 (extraits)