K I O S Q U E: Emma Goldman. Un an au pénitencier de Blackwell?s Island

4 juin 2005, publié à Archipel 128

Infokiosques.net, site Internet où on trouve des brochures subversives à lire, imprimer, propager, publie un des chapitres, inédits en français, de l’autobiographie d’Emma Goldman.

La vie d’Emma Goldman est si riche que son autobiographie remplit presque mille pages en anglais. Son histoire se confond avec celle de l’anarchisme. Plus encore: son histoire débute exactement avec l’histoire de l’anarchisme aux USA. Lorsqu’elle arrive à New York, l’anarchisme n’est pas vraiment sorti des ghettos d’immigrés, souvent russes ou allemands. La plupart de la propagande est tout d’abord faite en yiddish, en russe, en allemand.

Nous sommes en 1893

Emma a alors 24 ans et vient de rencontrer son nouveau compagnon Edward Brady, natif d’Autriche où il vient de purger une peine de 10 années de prison pour publication d’écrits illégaux. Son ancien amant Alexandre «Sasha» Berkman est lui-même incarcéré pour avoir tenté d’assassiner un patron d’industrie l’année précédente, Henry Clay Frick. Accusée «d’incitation à l’émeute» lors d’un discours prononcé à Union Square, Emma est arrêtée à Philadelphie puis extradée vers l’Etat de New York. La police lui propose, sans succès, de devenir indic pour éviter la prison. L’instruction se base sur les notes d’un agent de police, prétendument prises durant le meeting, alors que douze personnes présentes témoignèrent de l’impossibilité physique de prendre des notes à cause de la foule et qu’un expert déclara que l’écriture était bien trop régulière pour avoir été prise debout dans un endroit bondé. Un journaliste du World de New York témoigna en sa faveur mais ce fut sa perte. En effet, le lendemain du meeting, le World avait publié un article de ce même journaliste rendant compte du discours d’Emma à Union Square. Or, l’article avait été retouché et le propos du journaliste, complètement modifié, accusait Emma. Le journaliste n’osa pas témoigner contre son employeur en plein tribunal et son article fut suppléé à son témoignage. Contre l’avis de son avocat, elle refusa de faire appel: la farce de son procès avait renforcé son opposition à l’Etat et elle ne voulait lui demander aucune faveur. Son avocat refusa alors d’être présent le jour du jugement. Le même World qui lui avait joué un si mauvais tour lui proposa de publier le discours qu’elle avait préparé pour s’adresser au jury; elle y consentit, sous réserve d’avoir accès aux épreuves avant le tirage. Emma ne fut pas autorisée à adresser le discours qu’elle avait préparé au tribunal mais l’édition spéciale du World sortit comme prévu juste après le verdict de la cour. Elle fut condamnée à un an de détention au pénitencier de Blackwell’s Island (littéralement: l’île du puits noir).

Emma contribua à faire sortir ces idées du ghetto et à populariser l’anarchisme en apprenant l’anglais et en écrivant et donnant désormais des conférences dans cette langue. Le mouvement s’étoffe lorsqu’elle revient d’Europe. Plusieurs Britanniques ont émigré ou sont de passage aux USA, les publications anarchistes en langue anglaise se multiplient. Les combats les plus connus d’Emma Goldman furent notamment ceux pour la liberté d’expression, la liberté sexuelle, le droit à la contraception, l’égalité des femmes et des hommes, ou encore contre les guerres, toujours dans une perspective anarchiste. Emma Goldman et Sasha Berkman furent parmi les premiers à revenir de Russie (où ils avaient été exilés), après le massacre de Cronstadt, et à se battre, contre leurs camarades-mêmes, pour dire la réalité de la dictature bolchevique, et ce dès 1921. Il serait vain de lister tous les domaines et toutes les luttes où se firent grandement sentir les idées et l’influence d’Emma et de Sasha.

La brochure

Cette admirable autobiographie n’a pas été traduite en français. Il n’existe qu’une traduction partielle et adaptée 1, de 300 pages environ, dont des passages, voire des chapitres entiers, ont été supprimés, et la plupart des autres remaniés. Tous les chapitres concernant sa vie en prison ont été soit grandement réduits, soit totalement supprimés. Ainsi en est-il de celui qui suit, totalement inédit en français 2. Il s’agit du chapitre 12 de Living my life , traduit de l’édition Dover, New York 1970. Malheureusement, n’ayant pas l’original sous la main au moment de la mise en page, j’ai reformé les paragraphes moi-même, en espérant ne pas avoir fait trop d’erreurs. Je rajoute avant le chapitre 12, un petit résumé des événements qui l’ont conduite en prison et le dernier paragraphe du chapitre 11.

Je n’ai pas féminisé particulièrement le texte. Néanmoins, l’anglais ne s’embarrassant pas de distinction de genre la plupart du temps, j’ai parfois indifféremment employé le féminin ou le masculin là où les deux pouvaient s’appliquer.

Le petit peuple du cagibi

  1. Épopée d’un anarchiste - New-York 1886 Moscou 1920, traduction partielle et adaptation de Living My Life par Cathy Bernheim et Annette Lévy-Willard, Hachette 1979 puis Editions Complexe 1984 et 2002

  2. Traduction et édition

http://petitpeupleducagibi.org

anti© février 2005

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