Face à la détresse toujours plus grande des réfugiés, le «Cercle d’Amis Cornelius Koch», qui porte le nom de l’abbé des réfugiés décédé en 2001, lance un appel aux responsables ecclésiastiques en Suisse pour que ceux-ci soutiennent les paroisses et les bénévoles qui tentent de protéger les réfugiés par l’asile ecclésiastique.
L’initiative s’adresse à toutes les paroisses de Suisse, ainsi qu’à de nombreuses personnes dans tout le pays en leur demandant d’intervenir auprès de Gottfried Locher, président de la fédération des Eglises protestantes, et à Monseigneur Charles Morerod, président de la Conférence épiscopale, pour qu’ils manifestent leur soutien au maintien et à l’utilisation des refuges ecclésiastiques. Dans l’édition suisse de ce numéro d’Archipel, vous trouverez une lettre type à signer et à envoyer aux hautes instances des Eglises.
Nous avons déclenché cette action par indignation suite à la perquisition par la police de l’église Matthäus à Bâle en mars 2016; huit personnes qui y avaient trouvé refuge ont été arrêtées et expulsées de Suisse. En déclarant que l’asile d’église n’aurait plus aujourd’hui de raison d’être et que la police était libre d’effectuer des contrôles dans tous ses locaux, la direction de l’église protestante de la ville de Bâle avait précisément incité à perpétrer cette évacuation.
Une plainte
Le 26 avril 2016, la dizaine de réfugiés et leurs soutiens, qui étaient depuis plus d’un an sous la protection de la paroisse de St Laurent à Lausanne, ont déménagé dans la paroisse catholique de Mon-Gré. Bien que la paroisse protestante et ses deux prêtres aient appuyé cet asile, ce déménagement était devenu indispensable. C’est alors que la hiérarchie de l’église réformée du canton a essayé de chasser les réfugiés hors de l’église en déposant une plainte – heureusement sans succès. Après le déménagement à Mon-Gré le président du conseil synodal exprimait sa joie en déclarant: «Quelle bonne nouvelle, que les réfugiés soient enfin partis!» Cet exemple montre aussi que la Fédération des Eglises Protestantes et la Conférence des Evêques Suisses doivent s’exprimer clairement pour protéger les personnes en refuge ecclésiastique.
Concernant le conflit entre les prêtres de St Laurent et leur hiérarchie, une mauvaise nouvelle est tombée récemment en juin. L’un des deux prêtres, Daniel Fatzer, a été licencié à l’âge de 64 ans avec effet immédiat, parce qu’il avait dénoncé des injustices internes au sein du conseil synodal du canton de Vaud dans une émission radio. Pour le conseil synodal, ce n’était décidément pas suffisant d’essayer de chasser les réfugiés de l’église. Le prêtre a entamé une grève de la faim pour protester contre son licenciement.
Une pression énorme
La direction des Eglises devrait aussi dénoncer avec véhémence le comportement scandaleux des autorités politiques du canton de Zurich. Le 16 juin 2016 à l’aube, des fonctionnaires de la police cantonale ont gardé les entrées de l’église protestante de Kilchberg, et en ont sorti une famille tchéchène de six personnes pour l’emmener à l’aéroport dans une procédure de retour «volontaire». La famille était accueillie en asile ecclésiastique, après que la police a essayé de l’expulser par la force avec une grande brutalité. Arrivée après un long périple en Suisse, la famille y vivait maintenant depuis quatre ans et demi et avait trouvé un nouveau «chez soi» dans la commune de Kilch-berg. Le père avait été arbitrairement arrêté et torturé en Tchétchénie sous le gouvernement meurtrier de l’homme de Poutine, Ramzan Kadyrov. Malgré cela on lui a refusé l’asile en dernière instance au début de l’année. Entre-temps la famille s’était très bien intégrée, les enfants allaient à l’école et une large initiative citoyenne1 s’était créée pour défendre leur séjour dans la commune. Les autorités ont fait d’abord semblant de vouloir le dialogue, mais en réalité elles ne laissaient aucune marge de manœuvre, en proposant comme fausse alternative le retour «volontaire» en Tchétchénie ou le renvoi forcé. La famille s’est soumise à l’énorme pression pour éviter un nouveau traumatisme des enfants et pour épargner à l’église l’emploi de la force policière dans ses murs.
Respect de l’asile ecclésiastique
Tandis qu’en Suisse l’asile ecclésiastique est menacé, en Allemagne les directions d’église s’engagent depuis des années pour cet espace de protection. Plus de 250 paroisses accordent actuellement l’asile à des réfugiés. Entre-temps, le gouvernement allemand s’est même engagé à respecter la tradition de l’asile ecclésiastique. Les églises justifient l’ouverture de leurs portes par le devoir chrétien d’entraide et la défense des droits humains là où la protection de l’Etat est défaillante. En conséquence, l’asile ecclésiastique aujourd’hui est perçu non comme en opposition à l’Etat de droit mais comme son complément. A l’invitation de plusieurs initiatives d’aide aux réfugiés, Wolf-Dieter Just, président d’honneur de la «Communauté œcuménique Asile ecclésiastique» en Allemagne a tenu en avril 2016 une série de conférences sur ce thème en Suisse2. Voici un extrait de son intervention:
«...Depuis le début du mouvement d’asile ecclésiastique, en 1983, quelques milliers de réfugiés ont été sauvés de nouvelles persécutions, de tortures ou même de la mort. Dans près de 80% des cas, les asiles ecclésiastiques ont été des réussites, en ce sens qu’ils ont permis d’éviter une expulsion. On a ainsi pu gagner du temps pour un nouvel examen des cas, d’où il ressortait que des erreurs avaient été commises dans la procédure d’asile ou que des motifs d’asile ou des obstacles à l’expulsion avaient été ignorés. Comme chacun le sait, l’erreur est humaine. Et face au volume des demandes d’asile à traiter, on ne peut exclure des erreurs. Le problème c’est qu’en cas de mauvaise évaluation dans la procédure d’asile, les conséquences peuvent être désastreuses, fatales, dans le pire des cas.»
- <http://www.hierzuhause.ch>
- «Asile ecclésiastique: délit ou protection des droits humains?» Une conférence du Dr Wolf-Dieter Just. Un dossier de 4 pages contenant des extraits est disponible sur demande.
Envoyez une lettre de soutien à l’asile ecclésiastique à:
Mgr Dr Charles Morerod, Conférence des évêques suisses
Alpengasse 6, Case postale 278, CH-1701 Fribourg
Gottfried Locher, Président de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse
Sulgenauweg 26, CH-3000 Berne 23
Veuillez adresser une copie ou un message à: <freundeskreis_koch at gmx.ch> ou à l’adresse postale ci-dessous.Commande dossiers et de lettres-types:
Cercle d’amis Cornelius Koch,
Case postale 200
CH-2800 Delémont 1
Tél: ++41-76 461 16 41