Pour l’accueil de toutes les personnes fuyant la guerre en Ukraine! Non à l’exclusion raciste!
Nous saluons le fait que les États de l’Union européenne ont activé la «directive sur les afflux massifs» le 3 mars 2022, ouvrant ainsi la voie à un accueil rapide et simple des personnes fuyant la guerre en Ukraine. Les personnes qui fuient la guerre obtiennent ainsi un statut de protection limité dans le temps, mais renouvelable sur décision des ministres de l’Intérieur, statut qu’elles ne sont pas obligées de justifier dans le cadre d’une procédure individuelle, contrairement aux demandes d’asile. La «directive sur les afflux massifs» garantit également des normes minimales pour les personnes fuyant la guerre, comme le droit de travailler, l’accès aux systèmes sociaux et l’accès à l’éducation. Parallèlement, nous protestons vivement contre le fait que cette mesure d’accueil rapide et simple ne s’applique pas sans distinction à toutes les personnes qui fuient la guerre en Ukraine, mais qu’elle soit à nouveau entachée d’exclusions racistes: Selon la décision actuelle des États membres de l’UE, seul·es les citoyen·nes de l’Ukraine et les personnes qui bénéficiaient d’un statut de protection national ou international reconnu en Ukraine ont un droit contraignant à l’accueil dans les États membres de l’UE, conformément à la directive sur l’afflux massif. En revanche, les autres citoyen·nes de «pays tiers» qui ont vécu en Ukraine pendant une période plus ou moins longue, comme les étudiant·es étrangèr·es, les travailleur·euses migrant·es ou les personnes ne bénéficiant pas du droit d’asile, sont exclu·es du droit d’admission obligatoire dans les pays de l’UE. Pour ces personnes, les différents pays de l’UE peuvent certes décider eux-mêmes de les accueillir conformément à la Directive sur l’afflux massif, mais ils peuvent aussi leur refuser l’admission.
Cette exclusion concerne entre autres un nombre considérable d’étudiant·es originaires de pays africains, notamment du Nigeria, d’Algérie, du Ghana, de la Guinée, du Cameroun ou de Côte d’Ivoire, qui étudiaient, entre autres, la médecine jusqu’à l’éclatement de la guerre en Ukraine. Cette exclusion a été précédée dès le début par un harcèlement raciste de la part des forces de sécurité ukrainiennes et polonaises, qui ont notamment empêché les personnes africaines de mon-ter dans les trains avec d’autres réfugié·es ou d’entrer en Pologne. Dans la ville polonaise de Przemysl, de violentes attaques ont été menées par des gangs nazis contre des réfugié·es de guerre non-blancs. Ces derniers jours, des politicien·nes de différents pays de l’UE n’ont cessé de souligner dans leurs discours la différence entre les réfugié·es ukrainien·nes, qui feraient «partie de la famille européenne», et les milliers d’autres réfugié·es qui, depuis des années, ont pris le chemin de l’Europe en provenance de nombreuses régions du monde, fuyant la guerre, les persécutions et des conditions de vie insupportables.
Contrairement à la rhétorique raciste de division et à la pratique raciste d’exclusion dans les décisions des États de l’UE, nous exigeons:
- L’accueil rapide et simple des personnes fuyant la guerre en Ukraine par la directive européenne sur l’afflux massif de réfugié·es doit être étendu immédiatement et de manière contraignante pour tous les États de l’UE à toutes les personnes fuyant la guerre en Ukraine – sans aucune distinction de nationalité, d’origine, de titre de séjour ou de couleur de peau.
- Tant qu’il n’y a pas d’extension obligatoire de la directive sur les afflux massifs à toutes les personnes fuyant la guerre en Ukraine au niveau de l’UE, les différents États membres doivent eux-mêmes appliquer la directive sur les afflux massifs de manière à ce qu’elle s’applique sans distinction à toutes les personnes fuyant l’Ukraine.
- Les personnes réfugiées qui ont étudié en Ukraine doivent être admises dans les établissements d’enseignement supérieur des pays où elles se sont réfugiées pour y poursuivre leurs études, indépendamment de leur nationalité et de leur origine.
- Un renoncement fondamental à la politique européenne des frontières fermées, au régime frontalier meurtrier et à l’externalisation des frontières européennes. Des voies de voyage sécurisées, des frontières ouvertes et un accueil pour tou·tes les migrant·es et les personnes en quête de protection!
La pratique solidaire contre les conséquences de la guerre en Ukraine doit également inclure: Des mesures pratiques contre les conséquences graves et menaçantes de la guerre sur les per-sonnes du Sud global. Des pays d’Afrique du Nord, ou encore des pays comme le Kenya ou le Cameroun, ont jusqu’à présent couvert une grande partie de leurs besoins en céréales avec des livraisons de blé en provenance d’Ukraine et de Russie. Leur approvisionnement alimentaire est désormais gravement menacé. Dans d’autres pays africains également, les répercussions de la guerre sur le marché mondial menacent la sécurité alimentaire. Nous devons éviter que la guerre en Europe ne plonge les populations des pays africains dans une crise alimentaire!
Nous saluons le fait que des personnes dans différents pays européens – en Pologne, en Allemagne, en France, en Autriche et ailleurs – apportent ces jours-ci une solidarité pratique à l’accueil et à la poursuite du voyage des personnes fuyant la guerre en Ukraine. Nous appelons à ce que cette solidarité pratique s’étende à tou·tes celles et ceux qui fuient et à ce que la politique de division raciste soit activement contrée!
Afrique Europe Interact, 5 Mars 2022