Pınar Selek, sociologue, autrice et militante franco-turque, née en 1971 à Istanbul, aujourd’hui ci-toyenne française et maîtresse de conférence à l’Université Côte d’Azur, est injustement poursuivie par la Justice turque depuis plus de 25 ans pour un attentat terroriste qui n’a jamais eu lieu.
Connue pour ses recherches universitaires, pour son travail sur les minorités marginalisées en Turquie, notamment les communautés kurdes et arméniennes, Pınar Selek est également reconnue pour ses écrits littéraires, mais aussi pour ses actions militantes, féministes et pacifistes, axées sur les droits humains, sur les mouvements sociaux et les questions de genre. C’est une voix importante pour les droits humains et la liberté de recherche. En Turquie, le procureur général a systématiquement fait appel des quatre acquittements prononcés par le tribunal pénal, en 2006, 2008, 2011 et 2014. Sept ans plus tard, le 21 juin 2022, la Cour suprême turque annulait le quatrième acquittement. Six mois plus tard, un mandat d’arrêt international était émis à l’encontre de Pınar Selek, avec une demande d’emprisonnement immédiat.
Trois audiences ont eu lieu récemment à Istanbul, les 31 mars 2023, 29 septembre 2023 et 28 juin 2024, chaque fois en présence d’une importante délégation européenne. En juin 2024, deux jours avant l’audience, une pièce mensongère était versée au dossier, accusant Pınar Selek d’avoir participé à une conférence organisée par le PKK, alors qu’elle avait modéré une table ronde dans le cadre d’une conférence organisée en France sous la responsabilité de l’Université Côte d’Azur, de l’Université Paris Cité, du CNRS et de l’IRD. Les institutions académiques françaises ont immédiatement protesté, en amont de l’audience du 28 juin, par des courriers officiels adressés à la Cour, dénonçant une manipulation politique et une violation flagrante de la liberté académique.
Cette réaction immédiate, la présence d’une importante délégation européenne à Istanbul et la plaidoirie des avocats de Pınar Selek ont permis de déjouer la manœuvre du ministère de l’Intérieur turc, dans sa tentative d’assimiler une conférence universitaire organisée en France à un «acte terroriste». Aussi, le juge a-t-il annoncé un nouveau report d’audience demandant une nouvelle fois la présence de Pınar Selek, tout en refusant qu’elle soit entendue par voie de com-mission rogatoire, comme le permet la pratique de l’entraide pénale internationale.
Nouvelle audience le 7 février 2025
L’acharnement politico-judiciaire à l’encontre de Pınar Selek s’inscrit dans un contexte de montée de l’extrême droite en Europe, de mise en cause des libertés universitaires et de multiplication des violences et de restrictions des libertés visant l’ensemble des minorités et des opposant·es politiques.
De nouveaux juges ont été nommés pour statuer sur le sort de Pınar Selek. Il est difficile d’évaluer les conséquences de ce changement, mais une chose est sûre: seule une importante délégation européenne et une campagne transnationale en solidarité avec Pınar Selek et en défense des libertés d’expression, de recherche et d’opinion qui sont au fondement de la démocratie, empêcheront l’entérinement pur et simple de la décision prononcée en juin 2022 par la Cour Suprême qui annule le 4e acquittement sans nouveaux faits.
Pınar Selek doit pouvoir faire sa déposition sans quitter la France. Il en va de sa sécurité et de sa vie. Les démocrates de France et d’Europe se doivent d’agir contre cet acharnement judiciaire inacceptable qui, au-delà de la personne de Pınar Selek, concerne toutes nos libertés démocra-tiques, en particulier les libertés d’expression et de recherches académiques.
Les comités de solidarité avec Pınar Selek