HAUT-PARLEUR: Journée du souvenir trans

de Ouest Trans, 8 déc. 2024, publié à Archipel 342

Le 25 novembre, la journée internationale contre la violence patriarcale, de nombreuses actions et ma-nifestations ont eu lieu, de l’Asie aux Amériques en passant par l’Europe, manifestations qui se sont poursuivies pour culminer le 10 décembre, lors de la Journée internationale des droits humains. Quelques jours auparavant, le 20 novembre, dans le monde entier également, la Journée du souvenir trans commémorait les personnes trans assassinées, pour attirer l’attention sur les violences subies par les communautés trans.

Depuis 25 ans et la création du TDoR1 en 1998, le 20 novembre est l’occasion de se rassembler pour se recueillir et commémorer les personnes trans assassinées ou poussées au suicide à cause de la transphobie. Cette année, c’est au moins 350 personnes trans qui ont été assassinées dans le monde à cause de la transphobie. C’est 30 personnes de plus que l’an dernier, et au moins 5040 depuis 20082.

Ce chiffre reste encore aujourd’hui sous-estimé, tant il est compliqué de collecter les données de manière exhaustive et un certain nombre de meurtres dans le monde continue de ne pas être re-censé. Ce qu’il nous montre aussi, c’est que certaines personnes trans sont plus touchées par cette violence que d’autres.

Cette année, sur ces 350 personnes trans assassinées:

  • 94 % étaient des femmes trans ou des personnes transféminines
  • 93 % étaient racisées.
  • 46 % étaient des travailleur·euses du sexe.

L’intersection entre les différentes oppressions, transmisogynie, racisme et putophobie est d’autant plus dangereuse. Le climat actuel, ouvertement islamophobe, et les politiques racistes et visant à criminaliser les travailleur·euses du sexe sont des aspects d’autant plus aggravants contre lesquels nous devons lutter. Ce chiffre ne rend pas non plus compte des suicides provoqués par la transphobie, ni des morts résultant des difficultés d’accès aux soins quand on est trans. Et derrière les chiffres, ce sont des personnes, des noms, des familles, des proches, une vie enlevée.

Mais la transphobie, ce n’est pas que nos mort·es, car ce n’est que son expression la plus vio-lente. La transphobie, nous la vivons quotidiennement, dans les regards que l’on nous porte, les questions, les blagues, le harcèlement, la mise à l’écart, les agressions, les violences, la déshuma-nisation, l’exotisation, l’objectivation, et plus généralement dans les médias et dans le champ po-litique. La transphobie ne vient pas que des individus mais aussi des administrations, de la classe politique, du gouvernement, du corps médical, des médias et des mouvements réactionnaires.

La poussée des mouvements réactionnaires anti-trans constitue une menace de plus sur nos existences, nos conditions de vie et nos droits. Une offensive anti-trans se construit ces dernières années pour nier notre droit à disposer de notre corps, avec pour objectif d’empêcher toute dé-marche de transition, de nous renvoyer au placard et de nous faire disparaître. Cette année cette offensive s’est traduite concrètement par la proposition de loi des sénateurs LR s’attaquant aux mineur·es trans. Ces réactionnaires sont les mêmes que ceux qui s’attaquaient et s’attaquent encore au mariage pour tou·tes, au droit à l’IVG. Cette offensive réactionnaire anti-trans n’est pas une menace seulement pour les personnes trans. D’abord car elle joue un rôle d’enjeu mobilisateur pour les réacs de l’extrême droite, ensuite parce qu’elle est une manifestation d’un mouvement qui a pour objectif de faire reculer les droits de tou·tes les LGBTI et de tou·tes les femmes.

Face aux réactionnaires et à l’extrême droite qui nous attaquent au nom d’un ordre patriarcal, homophobe, transphobe, sexiste, raciste et autoritaire, il est plus que nécessaire et urgent de relever la tête pour construire la riposte. Celle-ci doit être la plus large possible, à travers les mou-vements féministes, LGBTI, antiracistes, et le mouvement social dans son ensemble. Elle est es-sentielle car lutter contre l’offensive réactionnaire en cours est aussi et plus que jamais un combat antifasciste.

Ce 20 novembre, nous partageons notre colère, notre indignation et notre tristesse pour rappeler que la transphobie tue. Nous commémorons celles et ceux qui ont été assassiné·es, poussé·es au suicide. Nous rendons hommage à toutes les victimes de la transphobie. Nous rappelons aussi la nécessité de lutter contre un système patriarcal et capitaliste qui nous opprime.

Ouest Trans*

  • <ouest-trans.org>
  1. Trans Day of Rememberance, Journée du souvenir trans.
  2. Source: Trans Murder Monitoring Project/TGEU, nombre d’assassinats recensés entre le 1er octobre 2023 et le 30 septembre 2024