Avec 32.000 hectares (320 km2!) de plastique, la province d'Almeria en Andalousie peut se prévaloir de la plus grande concentration de production intensive sous serre du monde.
- On y produit environ 3 millions de tonnes de légumes par année, dont la moitié est exportée en Europe (surtout en Allemagne et en France).
- Le prix à payer: un environnement détruit, un air vicié par les pesticides, un paysage sans arbres, sans oiseaux, ni insectes, l'épuisement des nappes phréatiques…
- Pendant la haute saison, en hiver, un millier de camions partent chaque jour chargés de tomates, de courgettes et de poivrons vers les marchés du Nord pour le compte des grandes multinationales de la distribution qui imposent aux producteurs des prix de plus en plus bas.
- Ce "miracle économique" n’est possible que grâce à l'exploitation d'une main-d'œuvre dépourvue de droits: environ 80.000 immigrés en provenance du Maghreb, de l'Afrique noire, et plus récemment d'Amérique Latine et de l'Europe de l'Est, dont la moitié est sans papiers. Ils sont embauchés à la journée, selon les besoins, pour un salaire de misère, presque tous sans contrat de travail.
- Les conditions de vie des migrants sont catastrophiques. Dans un contexte d'exclusion sociale et de racisme, la grande majorité est contrainte de se loger dans des bâtiments agricoles abandonnés ou des abris de fortune faits de restes de plastique et de carton. Pas d'électricité, d'eau courante, ni de sanitaires.
Seule la solidarité très forte qui les lie entre eux leur permet de supporter l'intolérable.
Sindicato de Obreros del Campo SOC (Syndicat des ouvriers agricoles andalous)
Le SOC se bat depuis presque 30 ans pour les droits des journaliers andalous (Jornaleros). Traditionnellement implanté dans les régions d'Andalousie dominées par les latifundias, il revendique une réforme agraire.
Depuis les émeutes racistes de février 2000 à El Ejido contre les immigrés marocains, le SOC a décidé de s'implanter dans la région des serres. Il a installé un bureau à Almeria, la capitale de la province, avec deux représentants: Abdelkader Shasha (Marocain) et Gabriel M’Binki Ataya (Sénégalais). Ils travaillent dans un environnement difficile et dangereux. Du fait qu'ils dénoncent les abus et les attaques dont sont victimes les travailleurs immigrés, ils sont exposés à toutes sortes de menaces.
Le SOC est le seul syndicat véritablement engagé pour les droits des ouvriers agricoles sur place. Il a besoin d'un soutien politique et financier durable.
Le Forum Civique Européen suit de près la situation en Andalousie depuis cinq ans. En collaboration avec le SOC, plusieurs délégations d'observateurs se sont rendues dans la région d'Almeria.
L'auto-organisation des immigrés
Il est extrêmement difficile pour les migrants de s'organiser. La région des serres est très étendue et les immigrés, fortement dispersés, n'ont pratiquement aucun endroit où se rencontrer. Ils partent tôt le matin à la recherche d'un travail d'au moins quelques heures et rentrent chez eux le soir. En ville, les sans papiers peuvent être arrêtés par la police et expulsés, et tous risquent d'être victimes d'intimidations et de violences. De plus, ils doivent faire face à une très grande précarité et ne peuvent guère se rendre au bureau du SOC à Almeria.
Pour toutes ces raisons, le syndicat considère qu'il est indispensable d'ouvrir des locaux à proximité des logements des immigrés. Ces locaux seraient à la fois des lieux de rencontre, de réunion, d'information et d'organisation. Le premier local devrait être installé à El Ejido où les migrants sont le plus fortement touchés par l'exclusion et la répression. Dans le contexte actuel de menaces et de pressions, il est impossible pour le SOC de trouver une location. Il a donc choisi de l'acheter.
Pour pouvoir acquérir ce premier local, une somme totale de 90.000 euros est nécessaire. Le SOC ne peut assumer seul le couroût d'un tel projet. C'est pourquoi une campagne de soutien est aujourd'hui lancée dans différents pays d'Europe. Il ne s'agit pas uniquement d’une aide financière, il est important aussi d'établir des liens directs avec le SOC et d'être prêts à intervenir au cas où ses représentants ou ses adhérents subiraient des menaces ou des agressions.